mercredi 12 septembre 2012

PORTRAIT DE DISQUAIRE #3 : BETINO

S'il y avait un concours du "disquaire le plus sympa du monde", Betino serait directement en finale. Passionné de musique, et homme au coeur d'or, voici le portrait d'un disquaire pas ordinaire :


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      Bonjour Betino, tu peux nous présenter ton parcours et l’histoire du magasin ?

J’ai ouvert le magasin en mars 1999. Ca fait bientôt 13 ans. J’ai ouvert la boutique, pas par hasard car j’avais bossé déjà 12 ans dans la distribution,  l’export, et en magasin de disque.
J’ai commencé en 1987 chez Radio Pygmalion, le magasin en face et concurrent de la fnac forum (juste en face).  Ils vendaient 50 centime moins cher. J’étais un passionné et acheteur de disques au quotidien. Je passais mes journées d’étudiant à faire les magasins d’occases et  de nouveautés.  J’achetais plein de news, funk & disco. J’ai eu la chance de suivre  des nouveaux mouvement comme  le hip hop dès début 1980, l’ electro, le funk, electro funk  puis la house. Puis  la fin  du hip hop old school, début new school avec RUN DMC.
J’ai attaqué dans une boutique en 1987, donc j’ai découvert plein de truc,  ça m’a permis d’élargir ma culture. Toutes les musiques sauf le classique. Plutôt musique black mais je faisais aussi du rock et de la new wave.
J’ai bossé un an et demi puis je suis parti faire de l’import de nouveauté  et j’ai rencontré KARAMEL. C’est devenu des potes  et ils m’ont proposé de venir bosser  avec eux. J’ai bossé 10 ans chez eux. On a tout fait,  de la distrib, de l’import  - export, des réeditions, des compiles…
C’était le début acid jazz : DJ cam , mighty bob, big cheese, pure les debuts de la scène française, les débuts de yellow. En France et à l’étranger.
On a ouvert un magasin de disque, qui a eu du mal au début puis je m’en suis occupé pendant 2 ans avant la fermeture. A la fin du bail, j’avais pas mal de clients donc je me suis dit que c’était bien de continuer avec une autre boutique. Ce n’était pas aventureux, j’avais de l’expérience, un stock de disques, des relations avec des distributeurs partout dans le monde, dans le milieu. Je n’ai pas monté mon magasin à l’aveugle.

-         Du coup c’était un rêve ?
Non pas au départ, je n’y pensais pas au début mon but c’était de continuer à bosser avec Karamel , dans la musique.


Vendre des disques c’est ce qui te fait te lever le matin?
Oui j’adore. Je rentre au magasin avec le sourire, c’est ma 2eme maison. Mon psychologue, ma manière de me sentir bien. Après ma famille, il y a ma boutique. J’arrive j’ai le sourire, je suis content d’être là, de discuter avec les gens, de vendre des disques.  Même si c’est stressant car lié à un chiffre d’affaire mais  je suis content de ne pas bosser que par rapport à ça.

-        Tu vois une évolution depuis l’ouverture ?
Oui , j’ai progressé en terme de CA. En 10 ans, les ¾ de la clientèle a changé. Tu ne peux pas compter sur les mêmes clients en long terme. Ils se marient, arrêtent d’acheter des disques. Je vendais toujours de tout mais il faut évoluer avec la musique. S’adapter et ne pas se perdre dans des musiques que tu ne comprends pas. Je ne fais pas de hard rock car je ne m’y retrouve pas. En Drum & bass et en broken beat, j’étais au top, j’ai senti que ça allait baisser et évoluer. Il faut suivre les chemins. J’ai toujours suivis les nouveautés depuis le hip hop ou la house. L’intérêt c’est de toujours être dans le truc, j’ai besoin de ça. Mais quand tu vois qu’un style s’enlise il faut passer à autre chose. J’ai arrêté des styles comme le R’n’B ça ne me plaisait plus, c’était moins intéressant c’était plus pour moi. Le hip hop fin 90, il a fallut choisir, je suis partis sur l’underground, le hip hop jazz et pas le commercial.
Ce sont mes gouts perso et le feeling des gens  qui me parlent de la musique. Je suis à l’écoute des gens, des news, des styles.

-        Par rapport à la crise du disque et l’avènement  du mP3, tu as vu des changements ?
      Oui, ça  a changé. Le 1er gros coup l' qu’on a subit, il fallait réagir : le 11 septembre, date très importante pour le son à NYC. NY s’est arrêté de vivre pendant plusieurs mois et c’était la source de toute la house, deep house, plein de label, distributeurs,  clubs ont fermés. Il y a eu une chute, je bossais beaucoup avec eux. Moins de production , moins de qualité, il a fallut passer à autre chose. 2ème coup / 2006 : développement du téléchargement. Ca a commencé à faire chuter le CD et le vinyle pour les DJs. Je n’étais pas trop touché car je n’étais pas trop sur la dance et le hip hop. Sur des gros volumes car j’avais déjà changé au début 2000. Heureusement que j’avais gardé une sélection de niche qui n’était pas téléchargeable. Ca s’est senti au niveau des maxis. Avec serato et tractor pas mal de Djs ont arrêté les maxis vinyle. Je me suis rendu compte qu’il fallait développer d’autres choses, dans le hip hop, dans les compiles, les rééditions. Acheter du son ancien différent. C’est un petit magasin donc tu peux modifier ton système sans perturber les gens.



-        Tu te reconnais dans le mouvement DIGGING?
     Je ne diggais pas trop, dans certains magasins d’occase mais je cherchais aussi des nouveautés. Je n’ai jamais été que dans le vieux , que dans l’illustration sonore ou du 45 tours. Je suis resté loin de ca et j’ai gardé du recule qu’il faut avoir en tant que disquaire. Quand tu as un magasin qui te prend toutes tes journées, tu ne peux pas tous les samedis et les dimanches te lever à 5h du matin pour aller chercher des disques. Je le faisais de temps en temps avant la boutique pour le plaisir, pas pour chercher la perle rare mais juste pour le plaisir. Je n’ai pas ce coté obsessionnel qu’ont d’autres, sans aucune critique,  mais plus une philosophie. Je dig quand je vais à NY , à londres, à tokyo. J’adore. On part 3 jours dans le New jersey en voiture. On fait tous les disquaires. Je l’ai fait plein de fois mais depuis 2006 il  y a une grosse chute.

-        Comment tu vois l’avenir ?
      Pas forcement en rose mais ceux qui vont tenir sont ceux qui savent gérer leur société, s’occuper correctement de leurs clients. Ceux qui arrivent à s’adapter aux nouveaux marchés, séduire une nouvelle clientèle : 14-19 ans qui achète du hip hop, du jazz, du rock, de l’afro. Pas beaucoup de budget, ne cherchant pas d’originaux mais des réeditions, des seconds pressages. Contrairement aux idées reçues les jeunes s’intéressent aux vinyles, mais avec un budget plus limité. Car beaucoup de sollicitation (téléphone, baskets, ). Il y a 30 ans, tu avais moins de sollicitations donc tu passais tout dans les disques. 
      Dans les années 80, c’était le disque avant tout, avant les filles et autres,  tout pour la musique. L’Objet obsessionnel du collectionneur. Je n’étais pas là dedans, aujourd’hui, les jeunes ont plus de recule.




Vinyle, CD ou mp3 ?
Je ne suis contre rien, je suis pour tout. Peu importe. L’important c’est d’aimer la musique. Mon plaisir N°1 c’est le vinyle, moins le cd. Mais j’encode mes vinyles et on les écoute sur l’ordi. On se fait des compiles. Je suis content d’avoir le vinyle même si je suis plus sélectif. J’adore la musique, je veux qu’elle me fasse du bien pas qu’elle m’enquiquine. J’ai la passion de la musique mais aussi des gens.

-        Un disquaire c’est  juste des disques ou il y a une dimension plus large ?
Oui c’est venir boire un verre, un café, discuter de la pluie du beau temps, rigoler parler musique. Il y a un temps pour tout. Certains viennent que pour la musique, je respecte, y ‘a pas de soucis. Mais tout le monde est diffèrent. C’est un endroit public  où les gens viennent s’exprimer mais aussi acheter des disques. Tout le monde est diffèrent.  La dimension humaine est importante autant que la musique Je ne travaille pas uniquement comme un marchand de disque mais comme un lieu de rencontre. On découvre une nouveauté, on va en parler, la faire partager. J’ai eu une période où tout les mardi j’avais les news, il y avait la queue devant le magasin. C’était important pour le business, mais ça m’angoissait car c’était la guerre pour avoir les disques. Ce que je ne voulais pas. Les gens ont changé, c’est plus cool, moins de compétition entre DJs ce qui n’est pas pour me déplaire.

BETINO, 32 RUE SAINT SEBASTIEN 75011 PARIS    www.betinos.com

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1...COS 'Postaeolian train robbery' 1974 ( Plus record) BELGIQUE
2...The Kenny Clarke/Fancy Bolland big Band "Manbo de las Brujas"  1968 (Prestige) USA
3....Hector Costita "Divagaçao 6/8"   1981 (Som Da Gente) BRESIL
4....Gloster Williams and Master Control " The message" 1979 (LA Record) USA
5....King Sporty & The Roots Rockers  " Badoo" 1979 (Konduko) USA




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